UPFléron

Wuidar Léopold

Pendant les sombres et douloureuses journées du début août 1914, l'angoisse et la mort avaient donné rendez-vous aux habitants de Magnée. Les Allemands cherchaient à s'infiltrer entre les forts de Fléron et de Chaudfontaine pour atteindre Liège tandis que l'infanterie belge, dont des observateurs étaient en liaison avec le fort de Fléron, avaient pris position sur les terrains, sillonnés de tranchées, occupés aujourd'hui par les maisons de la petite propriété terrienne et du foyer fléronnais, avec le square Baudouin comme centre approximatif. Les pertes allemandes sont lourdes ; leur vengeance, leur haine, leur rancune sera terrible pour la population civile. Dans le village, les troupes allemandes commettent d'ignobles atrocités, fusillent plusieurs habitants, dont des enfants, incendient fermes et maisons après les avoir pillées. C'est dans ce contexte que l'intrépide et courageux curé panse et soigne les blessés. Lorsque, en face de la maison où il prodigue ses soins, un schrapnell parti du fort de Fléron tue un cavalier allemand, le curé est arrêté de maîtresse façon, roué de coups, couvert de crachats, traité d'assassin et emmené comme otage. Il fut néanmoins libéré quelques heures plus tard et put regagner Magnée par les bois et campagnes tard dans la nuit.
Magnée était désert et l'église était transformée en une grande infirmerie pour blessés et agonisants allemands.
Quelques jours plus tard, le 13 août, le curé est de nouveau arrêté et emmené à l'église de Fléron ; il est condamné à mort avec fusillade reportée au lendemain matin. Mais sur ces entrefaites, le fort de Fléron avait hissé le drapeau blanc : le Commandant Mozin et ses braves soldats étaient contraints de se rendre après une lutte héroïque. Grâce à la reddition du fort, notre brave curé et d'autres personnes furent libérées le lendemain matin.
Nous disposons d'un texte écrit de la plume de l'abbé Widar ; c'est qu'en effet, au lendemain de la guerre, les prêtres arrêtés par les Allemands furent invités par l'Evêché à envoyer une relation des sévices subis :

« -Le 6 août 1914, pris par les Allemands sur l'ordre d'un officier supérieur, qui m'a mis en joue en disant à ses soldats : « Arrêtez-le, c'est un assassin ! ».J'ai expliqué que si j'étais couvert de sang, cela provenait de ce que je soignais mes paroissiens blessés. Explication pas écoutée ; emmené très durement ; obligation d'indiquer les chemins (je n'ai pas indiqué un pouce de sentier) ; menaces de mort ; obligation de rester debout pendant que le fort tire sur nous (les soldats se couchaient); marche à cheval contre moi qui étais à garder sur la route ; relâché le soir.
-Le 8 août 1914, obligation de rester à l'église menacée de bombardements selon eux. Refus de rester près d'eux, par principe, ne voulant pas coucher avec eux. J'ai passé la nuit devant l'église, dans la ligne du fort exacte, pour montrer que les Belges respecteraient l'église devenue Croix-Rouge.
-Le 13 août 1914, arrêté à Heusay avec M. le curé Lepropre, curé de Heusay ; journée tout entière en plein danger, sans nourriture, jusqu'au moment où ma pauvre vielle mère est venue elle-même, au milieu des troupes, nous apporter des tartines. Nuit affreuse dans l'église de Fléron. Condamnation à mort à 2 h de la nuit, dans l'église. Exécution annoncée pour le lendemain à 5 h 30, devant l'église, pour le cas où l'on tirerait encore sur eux. Relâché.
-Vendredi 14 août, rentrée au presbytère : tous les carreaux brisés, tous les meubles ouverts, fracturés ; vol de toutes choses pour plus de 3.000 F, peut-être 4.000 F car il y a des choses dont nous dirions difficilement la valeur.
-Le 29 mai 1915, emmené en prison à Saint-Léonard : accusé d'avoir enrôlé des soldats pour le front. Là, on a voulu me « mécaniser » pour me faire parler ; on m'a laissé avoir faim, ne me donnant que du pain gâté et vraiment puant. J'ai été traité comme un chien par le principal gardien.
-Au sortir de la prison, pour me rembourser les 25 F pris sur moi, on m'a remis des billets sans valeur.
-Le 6 septembre 1916, j'ai été condamné à 500 marks pour avoir dit que les Allemands étaient des assassins et des voleurs. Or je n'ai dit cela que sur l'injonction qui m'était faite à ces questions : « Pourquoi a-t-on fusillé les civils, pourquoi a-t-on brûlé les maisons, etc. ? J'ai dû payer pour éviter une nouvelle condamnation.
-Comme plusieurs autres habitants des environs, j'ai dû rester comme otage au début de la guerre, dans le fort de Fléron. Cela a duré environ 2 mois. »

Léopold Widar, curé de Magnée

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